La pièce de Bandélé est une adaptation du récit d'Aphra Behn, dont elle suit fidèlement la trame, en soulignant les événements "africains" qui forment l'essentiel de la pièce et notamment la traite des esclaves. Première partie : Afrique. Au 1er acte, le jeune prince Oroonoko prouve sa valeur en tant que guerrier et chef. Le 2ème acte dépeint les intrigues de la cour de Kormantyne où un roi sénile et impotent poursuit ses rêves de séductions physiques, encouragés par un conseiller retors et fourbe. Ce conseiller est l'intermédiaire du roi dans la traite des esclaves et fait sa fortune en vendant les prisonniers de guerre à un négrier anglais. Au 3ème acte, Imoinda mutile à mort le souverain. Seconde partie : Surinam. Au 1er acte, Oroonoko est vendu au représentant du Gouverneur. Il prouve sa loyauté en aidant les planteurs à se défendre contre les Amérindiens. Il retrouve Imoinda et lui jure amour et fidélité. Le 2ème acte est consacré à la révolte des esclaves dont Oroonoko prend la tête. Le 3ème acte présente la mort des deux héros.
Traitée sur un style presque élisabéthain où se mêlent l'histoire, la comédie, la bouffonnerie et la tragédie, la pièce est une excellente adaptation d'un récit donné en 1688 par Aphra Behn (1640-1689). Ce récit est fondé sur des événements réels qui se sont déroulés en Afrique puis au Surinam vers la fin de la décennie 1650-59. "Oroonoko or the Royal Slave, a True History", frappe le lecteur par son réalisme, sa véhémence et son actualité. C'est une dénonciation voilée, mais en avance sur son temps, de l'esclavage et du racisme. Sur cette toile de fond, Aphra Behn présente des personnages venus de trois horizons : l'Afrique, l'Europe, l'Amérique. Oroonoko, jeune guerrier, vend ses prisonniers à un négrier anglais qui trahit sa confiance et s'empare du jeune prince et de sa suite et les embarque avec les esclaves. Tous ces aspects n'échappèrent point à Biyi Bandele, écrivain nigérian yoruba, qui adapta ce récit et le fit jouer à The Other Place à Stratford, le 28 avril 1999. Il faut bien s?r envisager tout l'accompagnement chorégraphique et musical (percussion, tamtam et chants africains, yoruba ou autres). La pièce qui traite d'événements du XVIIe siècle, demeure cependant poignante en raison de son actualité et des échos qu'elle éveille dans nos consciences ; sans rappeler les écrits antillais et africains plus ou moins récents, ce récit et les personnages africains et européens qui l'animent en font un exemple véhément du conflit qui n'a pas encore été complètement exorcisé des mentalités, blanches ou noires. Biyi Bandele donne un rythme enlevé à ces courtes scènes où la psychologie des colonisateurs et des colonisés est finement présentée. Il a perçu l'absence de préjugés racistes chez Aphra Behn. Celle-ci montrait déjà en 1688 que la civilisation et aussi ses défauts n'étaient pas l'apanage des seuls européens.