La fable est celle d’un personnage dénommé Gospodin, propriétaire d’un lama qu’il abrite dans sa cave et avec lequel il gagne sa vie en l’exhibant dans les rues de la ville : « une nouvelle forme d’existence indépendante », selon lui. Au début de la pièce, Greenpeace vient de lui confisquer ce lama, accusant Gospodin « d’esclavagisme ». Cette perte précipite Gospodin dans une crise existentielle. De scène en scène, il va se voir dépouillé d’autres éléments de sa vie : un frigo qu’il prête à un ami, une télé qu’un autre lui emprunte à des fins artistiques, une chaussure etc. …jusqu’à sa femme. Il subit une espèce de clochardisation progressive, dormant dans son appartement vide, sur la paille qui fut celle du lama. Il refuse cependant toute forme de travail rémunéré et subordonné et s’efforce de vivre du troc des quelques affaires qui lui restent. Il rédige, sur le mur de sa cuisine, un « dogme », son programme de vie, dans lequel il exprime entre autres son rejet de l’argent et de la propriété. Un vague ami dépose chez lui un sac plein de billets de banque avant de disparaître. Plus tard, Gospodin découvre que cet homme est mort accidentellement. Gospodin se retrouve alors virtuellement riche et tous ses amis reviennent pour en avoir leur part – que Gospodin leur refuse. Pour finir, il est arrêté par la police, interrogé sur l’origine de l’argent et condamné pour complicité de vol. Et c’est paradoxalement en prison qu’il déclare enfin avoir trouvé son bonheur et sa liberté.
La forme de la pièce est particulière : il y a une alternance entre les scènes à deux personnages (Gospodin + un interlocuteur) et des monologues descriptifs de deux narrateurs anonymes, « elle » et « lui ». Ces descriptions racontent, à la troisième personne, certaines situations vécues par Gospodin et deviennent des envolées lyriques : promenades et observations en ville, une fuite éperdue dans les rues, des courses dans un hypermarché…
Ce thème ironiquement d’actualité – le refus radical de la valeur travail - est traité avec beaucoup d’humour : les scènes sont drôles, les situations surprenantes ou paradoxales, et les dialogues souvent comiques. L’alternance des scènes avec les moments plus poétiques portés par les deux narrateurs requiert et devrait stimuler l’invention d’une forme théâtrale originale. Dans le même sens va l’indication de l’auteur « trois comédiens au minimum » jouent les treize personnages de la pièce.