Résumé
Une femme de 60 ans, à moitié paralysée, Mme Dam Tuy, célèbre actrice et écrivain de théâtre, vit recluse dans sa chambre. Le téléphone sonne. Un journaliste veut l'interviewer. Elle refuse. Il insiste. Il sait qu'elle acceptera. Elle ne sait pas refuser à qui sait l'attendre et le journaliste en est à sa dixième demande d'interview. Que veut-il? Qu'elle parle des hommes qui ont compté dans sa vie. Dans un magnétophone, si cela l'arrange. La femme parle au magnétophone, à elle-même, de ses quatre mariages ratés : Il y eut l'homme de pouvoir, l'homme de l'art, et Ly Khac Nhan, l'homme de l'amour. Quatre fois, elle a préparé sa robe de mariée. Quatre fois, elle l'a rangée, revenant chaque fois au seul amour digne et fidèle de sa vie : son travail. La nuit tombe. La lumière s'éteint. Le jour se lève. La femme ouvre une enveloppe contenant une cassette vidéo. Elle vient du journaliste. Il a reçu son récit. Il lui reproche d'avoir menti. Il a rencontré tous les hommes dont elle a parlé. Aucun ne correspond au portrait qu'elle en a fait. Les hommes dont elle a parlé sont à moitié des êtres fictifs. Mais le mensonge essentiel est ailleurs. Elle a omis de lui parler d'un événement qui a marqué sa vie et qui explique sa haine des hommes : à cinq ans, dans le tourbillon de la guerre, un homme l'a violée. Cet homme, c'était le propre père de Nh‚n? C'est pourquoi Nh‚n l'a fuie après la guerre. Il n'est revenu que trente ans après, au moment où il pouvait enfin l'épouser. Le journaliste se présente, il est le fils de Nh‚n, il a quarante ans, il est resté célibataire, il veut l'épouser. La femme refuse : vous voulez m'utiliser pour effacer à la fois le crime de votre grand-père et la beauté d'âme de votre père. La femme sort péniblement sa dernière robe de mariée pour rejoindre Nh‚n qu'elle croit ressuscité en regardant l'image du fils dans la cassette vidéo. Une voix l'avertit : ce n'est pas une robe de mariée, c'est une robe funéraire. Elle la met quand même. La musique de mariage éclate. Une voix déclame un poème, le poème de l'attente.
Regard du traducteur
Parler des hommes de sa vie, cela ne se fait pas au Vietnam, sous le communisme confucéen. En parler comme Mme Minh Ngoc, et des hommes de ce temps, cela se fait encore moins. C'est peut-être pourquoi cette pièce, en apparence peu politisée, attend toujours l'autorisation d'être montée. Elle mérite pourtant d'être portée à la connaissance du public. La fin est particulièrement belle, poétique.