Médée, écrit Corrado Alvaro, est l'ancêtre de toutes les femmes qui ont enduré une persécution raciale, de toutes celles qui, rejetées par leur patrie, errent sans passeport, de contrées en contrées, et finissent pa se retrouver en camp de concentration ou en camp de réfugiés. Médée tue ses enfants pour ne pas les exposer au tragique vagabondage, à la persécution, à la faim. Elle lève la malédiction sociale et raciale. Elle les tue pour les sauver, dans l'élan d'un amour maternel désespéré.
La longue nuit de Médée est une nuit d'attente. C'est l'attente de Jason et d'un destin qu'il faut éclaircir. Corrado Alvaro a rapproché la psychologie et la géographie du mythe de sa terre natale, l'Aspromonte, la Calabre, dans le temps et les lieux, dans la magie de la cellule familiale. Il a su se faire l'écho d'un mythe et d'une réalité.
Les personnages de Corrado Alvaro sont d'éternels exilés qui aiment le vieux monde mais sont fascinés par un monde moderne qui les rejette. Leur aventure est quotidienne et divine, entre la nostalgie et l'effroi.
Dans son écriture, Corrado passe du mythe à la réalité, de l'engagement à la fable, de la pitié à l'indignation envers les injustices sociales et les différences raciales qui frappent les gens de sa région. Comme Giovani Verga et Luigi Pirandello, ses deux maîtres, il place le naturalisme à l'origine de l'Antiquité grecque