Écriture

  • Pays d'origine : Italie
  • Titre original : Il lampadario
  • Date d'écriture : 2019
  • Date de traduction : 2021

La pièce

  • Genre : drame
  • Nombre d'actes et de scènes : 6 chapitres
  • Nombre de personnages :
    • 4 au total
    • 3 homme(s)
    • 1 femme(s)
  • Durée approximative : 90 mn
  • Création :
    • Période : 2020
    • Lieu : Biennale di Venezia
  • Domaine : protégé

Édition

Cette traduction n'est pas éditée mais vous pouvez la commander à la MAV

Résumé

Le texte s’inspire de l’effondrement du pont de Gênes en août 2018.

Au dernier étage d’un appartement au-dessus d’un pont d’autoroute, deux hommes et une femme échangent, de manière puérile, et abordent des sujets sérieux de manière fantaisiste.

Parallèlement nous avons un personnage dans sa voiture qui, au milieu des banalités, de la drôlerie, nous ouvre sur un monde poétique. Le pont s’effondre et le conducteur se retrouve prisonnier de sa voiture. Dans un monologue haché, mélangé, assez confus, désordonné, il essaie de faire l’inventaire de son corps. Entre angoisse et impossibilité de bouger, il aperçoit, depuis sa position, la fenêtre où habite le trio et il essaie mentalement d’implorer leur secours.

Nous finirons par comprendre que les trois personnages sont en fait coincés dans la voiture, que deux d’entre eux sont morts et que le seul survivant se retrouve tête en bas. Il se réconciliera avec le présent en comprenant l’absurdité du monde depuis cette perspective et se laissera partir en chantant.

Regard du traducteur

Caroline Baglioni est, avant tout, une actrice. Pour elle la parole au théâtre doit partir le plus possible du corps. Ceci amène à une autre forme de poésie, vivante et décalée.

Nous avons donc dû prendre soin de la logique toute particulière des personnages et du comique qui s’en dégage en respectant les images de la langue et la simplicité des échanges qui sont toujours fort complexes à restituer. Le français est souvent plus long, plus exigeant, nous avons tenté́ de rendre les dialogues le plus fidèlement et le plus légèrement possible.

L’autrice alterne ces dialogues avec des monologues beaucoup plus poétiques dans un mouvement magique, où, comme pour les illusionnistes, des choses peuvent disparaître ou réapparaître à l’envi.

La langue du personnage du Pendu, pendant son monologue la tête en bas après l’écroulement du pont, devient le reflet d’une condition renversée. Ici Caroline Baglioni a voulu éprouver ce que voulait dire avoir le sang qui monte à la tête, en se mettant réellement à l’envers à l’occasion de l’écriture de ce texte. Ce qui en découle c’est un discours « brouillardeux » où toute la langue est influencée par la posture.

Du coup, même dans sa disposition sur la page, le texte prend une forme vivante : un graphisme avec des espaces plus ou moins longs, une exploitation du vide, il y a du corps même entre les lignes.

Les images au ralenti des bouts de matière solides qui se désagrègent sont aussi les symptômes de notre période historique, schizophrénique, impossible à juger, à condamner ou à sauver. On a parfois l’impression d’être face à une période où tout est juste et faux en même temps, où rien n’est clair, mais où nous croyons être capables de gérer notre perte de repères, où nous nous croyons indépendants.

Dans la pièce le réel est flouté, les frontières sont gommées : il y a un va et vient dans la fiction. On part d’une situation extrêmement concrète, d’un récit dramatique traditionnel, pour ensuite exploser le cadre de la narration. Les plans finissent par se chevaucher, pour créer un nouveau sens, plus profond.

La crise projette les individus dans une bulle d’incrédulité, d’inaptitude et de défiance vis-à-vis du futur qui s’est largement étendu au monde entier. Nous vivons dans un état d’alarme. Dans Le Lampadaire, le scandale italien de l’effondrement du pont Morandi de 2018, devient le prétexte pour parler d’une résilience, une résistance, une volonté de reconstruction dont les citoyens et les populations sentent grandement le besoin.

Le pont devant les yeux des personnages relie le passé et le futur au temps présent et le lampadaire est la métaphore d’une condition existentielle et physique : pendu la tête en bas, le monde se renverse et prend de nouvelles formes suivant des chemins inattendus.

Nous trouvons de manière plus générale, et non seulement avec ce texte, que Caroline Baglioni a une voix singulière et, à la fois, bien ancrée dans le panorama général de l’écriture contemporaine italienne, avec des accents suffisamment universels pour intéresser la scène française. Elle nous semble être une nouvelle voix à connaître et à partager largement.