Les deux filles de M. Sawa

de Kunio Kishida

Traduit du japonais par Jean-Christian Bouvier

Avec le soutien de la MAV

Écriture

  • Pays d'origine : Japon
  • Titre original : Sawa shi no futari musume
  • Date de traduction : 1992

La pièce

  • Genre : théâtre de texte, littéraire et psychologique.
  • Nombre d'actes et de scènes : 3 actes composés chacun d'une longue scène.
  • Décors : Acte 1 et 2 : intérieur de style occidental. Sawa est administrateur d'un sanatorium dans la banlieue de Tokyo .Acte 3 : chambre dans un meublé.
  • Nombre de personnages :
    • 7 au total
  • Durée approximative : 60 à 90 minutes
  • Création :
    • Période : 18 mai 1951 - (Reprise en Décembre 1988 par le Tokyo Engeki Ensemble, à Tokyo)
    • Lieu : Kyoto Shinbun Hall, Kyoto, par la troupe Kurumi-za
  • Domaine : protégé : Eriko et Kyoko Kishida, filles de l'auteur.

Édition

Cette traduction n'est pas éditée mais vous pouvez la commander à la MAV

Résumé

Après une longue carrière médiocre à l'étranger au cours de laquelle il a négligé sa famille. Kazuhisa SAWA vit à Tokyo entre ses deux filles, l'aînée Etsuko (habillée à la japonaise) et Aiko la cadette (vêtue à l'occidentale). Incapable d'assumer ses responsabilités, il laissera, par faiblesse, se développer l'antipathie entre les deux soeurs et ne pourra empêcher l'éclatement de la famille. Aiko épousera un étranger fortuné, un scandale poussera Etsuko à partir, tandis que Sawa, malgré un remariage tardif avec sa servante Raku, finira seul dans un meublé presque sordide.

Regard du traducteur

Présentée, à juste titre, comme l'une des premières réussites du "théâtre moderne" japonais, la pièce de Kishida risque de surprendre le public français par sa facture extrêmement traditionnelle. C'est, en effet, un pur théâtre de texte qui décrit une situation familiale à un moment de crise et s'attache à rendre "la réalité émotionnelle" des personnages par le recours à une analyse psychologique fine mais très classique. Il faut comprendre qu'à l'époque où Antonin Artaud découvrait, ou pressentait, un théâtre du "corps" et de la "cruauté" du côté de l'Asie, Kunio Kishida devait, lui, parcourir le même chemin EN SENS INVERSE pour rencontrer sa "modernité" d'homme de théâtre. Rendre compte de la société japonaise de son temps, "fouiller" les caractères, utiliser une langue non figée par la déclamation, rechercher le "naturel" tout en haussant le texte à la hauteur de la "littérature" étaient autant de conquêtes par rapport à la tradition japonaise. Il faut accepter le paradoxe : ce théâtre qui peut nous apparaître un peu vieillot faisait table rase du passé et apportait des formes nouvelles.

Autre sujet d'étonnement : ce théâtre d'avant-garde au lieu d'exalter la modernité (laquelle à l'époque ne pouvait qu'être "occidentale") est tout entier voué à en décrire les ravages : la démission du père, l'éclatement de la famille marquent la déliquescence généralisée des valeurs traditionnelles.

Avec un peu d'ironie acerbe et beaucoup de nostalgie impuissante, la pièce reste, à ce titre, passionnante (image très forte du père dans la scène finale grignotant son quignon de pain et son bout de fromage. Image dérisoire, certes, mais aussi poignante, comme celle de l'artiste et de l'intellectuel japonais moderne).

Pour Yukio Mishima, les pièces de Kishida étaient de la musique de chambre pour le théâtre.