A la fin de la seconde guerre mondiale, Clausewitz, un immigrant polonais, cherche une vie nouvelle dans un Brésil fantasmatique qu'il ne connaît qu'à travers ses études de portugais. Il laisse derrière lui sa famille et ses amis - morts torturés - et aussi son métier d'acteur. Peut-on vraiment être acteur en temps de guerre ? Il décide de devenir agriculteur dans un pays qui n'a pas vécu les horreurs de la guerre, de labourer une terre vierge en quelque sorte. Sa vie est entre les mains d'un fonctionnaire cynique et tâtillon chargé de l'immigration. Cet homme – dont on découvrira un passé trouble au service de la dictature – lui propose un marché cruel : pour obtenir son "laisser-passer" il doit le faire pleurer avec le seul récit de ses souvenirs. Dehors, le navire qui emmènera Clausewitz s'il est refoulé appelle les passagers à grands coups de sirène. Il doit relever le défi, et vite. Que faire pour émouvoir son tortionnaire ? Du théâtre : un très beau passage de "La vie est un songe" de Calderon de la Barca. La larme est versée : Clausewitz pourra rester au Brésil. Même en temps de guerre, il reste acteur.

Bosco Brasil traite d'un thème qui lui tient à cœur : le théâtre. En renonçant au théâtre, le héros renonce à lui-même, il ne sait plus qui il est, à quoi il sert. Il est comme paralysé. "Il étouffe son indignation, car les mots lui manquent pour répondre. Mais cette paralysie est aussi une réponse. Peut-être la pire. L'envie que l'on nous retire des mains le droit et la responsabilité de décider." Qu'est-ce qu'être acteur ? qu'est-ce qu'être, tout simplement ? Etre, dans le théâtre, c'est être en action, en réaction, en vie. Cette pièce est à la fois un hommage et un don aux acteurs.