Acte 1 (la chronologie des scènes n’est pas linéaire)

1. Une petite base de recherche sur Platon. Suite à la perte de contact avec la Terre, la tension monte entre Ray, commandant, et Gilda, commandante en second et chargée d’une étude géologique sur Pluton.

2. Une jeune femme, Mattie, interroge Clark, ingénieur de la mission, sur son passé sur Terre : il fait partie des dernières personnes à avoir touché un arbre. Cole, météorologue, entre pour se préparer à manger. Clark se moque de l’abri anti-bombes qu’il s’est fait construire sur Terre. Gilda entre et demande à Clark de nettoyer une grande tache en forme de X sur le mur. Il rechigne, mais finit par le faire.

3. Ray, en compagnie de Clark, mémorise le chant des oiseaux. Il était sur Terre le jour où tous les oiseaux sont morts. Profondément dépressif, en dépit de l’amitié de Clark, il ne voit aucune raison de revenir sur Terre.

4. Gilda croit surprendre un bruit dans les systèmes d’alimentation. Elle pense qu’il s’agit de Mattie, mais celle-ci apparaît en bas. Gilda lui demande de vérifier les systèmes.

Elles échangent sur les problèmes d’anxiété de Gilda, devenue commandante suite à la mort de Ray, et sur sa peur de ne jamais rentrer sur Terre. Elle évoque sa mère qui l’y attend, avant de se souvenir que celle-ci est morte juste avant son départ. Mattie mentionne une conversation qu’elle a eue avec Ray quelques semaines avant sa mort, au sujet de la petite fille qu’il a cru voir à la fenêtre, avec une cicatrice en forme de X sur la bouche.

5. Cole travaille à une équation pour retrouver le temps : l’horloge centrale de la station s’est déréglée, et toute la station est dans l’incapacité de se repérer dans le temps ou de le mesurer. Il fait part de sa découverte à Clark.

6. Gilda soigne Ray, qu’elle a surpris en train de se trancher les veines.

7. Ray se suicide, suite à l’apparition fantômatique d’une petite fille à la bouche mutilée à l’intérieur de la base spatiale.

A_cte 2

Mattie est en tenue de cosmonaute dans la salle commune. Gilda, qui ne la reconnaît pas, pense qu’elle a été envoyée pour les sauver et rapatrier l’équipe sur Terre.

Retour en arrière. Clark, Cole et Gilda cherchent à comprendre le récit de Gilda, qui prétend qu’une femme est venue pour les rapatrier. Mais son discours, de plus en plus incohérent, contamine bientôt ses coéquipiers, alors que leurs repères temporels et rationnels sont de plus en plus brouillés.

Après un temps indéterminé, Cole meurt d’un cancer.

Gilda et Clark restent seuls. Alors que leur langage se délite et que leurs souvenirs se confondent, ils se rappellent l’histoire d’amour qu’ils ont partagée. Clark meurt dans les bras de Gilda.

Gilda accouche d’une petite fille.

Elle apparaît, enfant. C’est la petite fille qu’avait vue Ray, mais sa bouche n’est plus mutilée. C’est Mattie.

Elle ré-apparaît, adulte, pour accompagne sa mère dans ses derniers moments.

X d’Alistair McDowall s’inscrit dans un univers de science-fiction et obéit à certains codes du thriller. 

Comme son nom le suggère, la pièce est construite sur le modèle d’une équation dont les inconnues sont l’identité et le temps.

L’intrigue principale suit l’histoire de Gilda, géologue en mission sur Pluton, depuis son arrivée sur la base, quelques mois après le décès de sa mère devenue démente sur Terre, jusqu'à sa propre mort sur la base, où seule sa fille Mattie lui survit.

La pièce, construite depuis sa perspective, intègre progressivement certains symptômes de la démence du personnage, et notamment une confusion des identités qui affecte principalement le personnage de Mattie, la fille qu’elle aura sur Pluton avec un autre membre de la mission, Clark.

Alistair McDowall expérimente dans X une modélisation non-linéaire du temps, inspirée des recherches de la physique quantique. Les scènes ne se déroulent pas dans un ordre chronologique, et le passé, le présent et le futur peuvent coexister dans une même scène.

La pièce est écrite dans une langue vive, rythmique, avec de belles partitions pour les interprètes. La dramaturgie, tout en s’appuyant sur des personnages construits, fait vaciller les frontières du réel et de la fiction, à mesure que l’imaginaire des personnages brouille leurs perceptions. L’acte 2 est à cet égard remarquable.

La pièce pose de formidables défis de mise en scène, non seulement en raison de son univers futuriste et de son esthétique de science-fiction, un genre de plus en plus travaillé au théâtre, mais surtout pour le traitement non-linéaire de sa fable.

Les thèmes abordés (écologie, fin de l’humanité, transmission) s’inscrivent dans les débats les plus actuels.