Résumé
La faveur d'Apollon vaut à Admète, roi de Phères en Thessalie, de bénéficier d'un "marché" conclu par le dieu : alors qu'il devrait mourir, il peut se faire remplacer par une personne de son entourage. Seule Alceste, sa femme, assume ce rôle. (Ceci est raconté, en prologue, par Apollon, qui disparaît ensuite de toute la pièce). Le déroulement de la pièce va montrer que cet échange est dépourvu de sens, qu'Admète (censé en être le bénéficiaire) n'y gagne rien ; enfin dans l'épilogue (annoncé par Apollon) Héraklès, hôte et ami du roi, ramène Alceste de chez les morts.
Regard du traducteur
Un auteur célèbre, mais dont l'image en France (à travers les traductions, commentaires, critiques, adaptations..) offre une dissociation paradoxale entre un bord "rhétorique", rationaliste, sophistique etc... parfois déprécié au nom du sens du théâtre, et un bord "pathétique", psychologique virtuose, amateur d'effets, volontiers pris comme illustration de la thèse d'un déclin du genre tragique, Euripide étant son représentant connu le plus tardif, parmi les trois "grands". Ces représentations étant à la fois actives dans l'élaboration du travail de traduction, d'édition et de critique de l'oeuvre d'Euripide, et entretenues par ces pratiques-mêmes, il semble nécessaire de tenter un abord nouveau du texte, qui travaille à s'affranchir autant que possible des présupposés hérités de la tradition : c'est ce que j'ai tenté, à l'initiative et avec le soutien de Pierre Judet de la Combe, pour aboutir, gr‚ce à l'appui de la Maison Antoine Vitez, à une traduction orientée vers l'idée d'une représentation sur une scène d'aujourd'hui. Le choix de cette pièce répond à l'intérêt de la forme particulière (une tragédie programmée pour être jouée à la place d'un drame satyrique : nous n'en avons pas conservé d'autre exemple), qui se prête particulièrement bien à une exploration de la question du tragique chez Euripide ; d'autre part, tout en évoquant, dans un public non antiquisant, des échos familiers pour certains (les opéras...), Alceste ne fait pas partie des pièces les plus souvent jouées/re-traduites/adaptées du corpus d'Euripide, à l'heure actuelle en France.