Au bord de l'eau, des lumieres est le titre d'une chanson qui a marqué les années 70 à Moscou. Le choix de ce titre traduit l'un des thèmes de la pièce : la nostalgie du pays perdu et au-delà, la difficulté quasi-philosophique d'être émigré. Là-dessus, consécutivement à la glasnost, se greffe une autre question concrète : maintenant que la chose est possible, faut-il rentrer en Russie ou non. A la lumière de ces questionnements, les personnages vivent leurs doutes sans longs discours, sans "tunnels", sans phraséologie. Ils s'expriment au quotidien, mais à travers leurs propos si simples, c'est une réalité historique qui s'exprime, en appui sur quelques phrases-choc comme celle-ci :
- Il n'y a plus de Russie, rien qu'un territoire peuplé de bric et de broc. Pas un pays : un trou noir.
- Vous dites que ce sont les youpins et les métèques qui ont bousillé la Russie, mais qui leur a inculqué leurs idées, sinon nous, les nobles révolutionnaires du XIXè siècle ?
Et dans la même optique, GOVOROUKHA ne se pose pas en victime du stalinisme, contrairement à tous les autres, mais de son propre laisser aller. Cette optique est peu banale et elle se veut réfléchie. Elle est dure, elle ne répond cependant pas à l'étiquette de "fureur" qui s'applique à d'autres oeuvres de MAXIMOV.
Un autre thème important est celui de l'alcoolisme, de ce que ses victimes elles-mêmes, dans ce vaste pays, appellent "le mal russe". Ces quelques remarques montrent que loin d'être une pièce anecdotique, Au bord de l'eau, des lumieres est une pièce-témoin dont l'intérêt d'actualité s'impose. Elle est solide, de bonne facture, servie par un dialogue serré.