Il y a longtemps que je ne chantais plus pour personne

de Malina Prześluga

Traduit du polonais par Agnieszka Zgieb

Avec le soutien de la MAV

Écriture

  • Pays d'origine : Pologne
  • Titre original : Dawno nie było komu śpiewać
  • Date d'écriture : 2024
  • Date de traduction : 2025

La pièce

  • Nombre d'actes et de scènes : 2 actes, Acte 1 : 16 scènes, Acte 2 : 1 scène
  • Nombre de personnages :
    • 4 au total
    • 1 homme(s)
    • 3 femme(s)
  • Durée approximative : 120 mn
  • Domaine : protégé : Agencja dramatu i Teatru ADIT

Édition

Cette traduction n'est pas éditée mais vous pouvez la commander à la MAV

Résumé

La pièce de Malina Prześluga est divisée en deux parties. Dans la première, quatre personnages — trois femmes, un homme — discutent. Peu à peu, chacun commence à prendre conscience de la futilité de leur bavardage et de leur vie. La frustration révèle leurs émotions, leurs désirs, leurs déceptions, les amenant à réévaluer leur existence et à chercher un autre chemin. 

Dans la première partie, nous sommes les témoins d’une conversation sur la colère et l'endroit exact où elle se manifeste dans le corps. On se retrouve ensuite dans la file d'attente d’une billetterie de théâtre, pour assister à une discussion sur la façon dont le monde peut encore nous surprendre.

La deuxième partie opère une rupture radicale de style et de caractère. Nous voilà quelque part à la lisière d’une légende, ou d’un mythe, en quête de la possibilité d'un autre monde. Les personnages abandonnent leur vie, s'enfuient dans la forêt, où ils se jettent dans les bras de la folie. Une bête mystérieuse et éternelle les attend, nommée Prastwór Perepłut (Pereplut Esprit-ancien). Le style narratif change : Anna décrit les pensées et les actions du monstre, et le langage — si important dans cette œuvre — est saturé de métaphores corporelles proches de la nature. Et toutes les angoisses se perdent dans la gueule du monstre… 

Ce qui préoccupait au début les personnages se dissout dans la vieille forêt, symbole d'une sorte d'harmonie originelle. C'est un monde au-delà des valeurs reconnues, qui met à nu l'illusion de la sécurité apportée par la culture ou la morale. Émerge alors une essence ancienne, très ancienne, extra-humaine, de l'existence. Il s'avère que sous le vacarme du chant civilisationnel, se cachait une mélodie bien plus belle...

Regard du traducteur

Le récit, décousu, fragmenté, volontairement incohérent, permet à Malina Prześluga de suivre librement des associations et des réflexions qui, bien qu'elles refusent de former un diagnostic cohérent de la réalité, ne peuvent plus être étouffées. La question du sens du théâtre et de la fiction face à la guerre à nos portes côtoie un échange d'informations sur la cueillette des champignons, saturé d'humour absurde (les ramasseurs de champignons se lèveraient à 4:48, l'heure du suicide [chez Sarah Kane]).

Ce chaos est intentionnel, car tout ce qui se situe entre l'excès d'émotions et de désirs, entre le vide et la résignation, constitue le contenu essentiel de la pièce. Le texte de Prześluga exprime à la fois la désillusion face à la réalité, la lassitude, le repli sur soi, l'impuissance et la tristesse, mais aussi le désir désespéré d'une vie autre. Le sentiment de perte, qui naît de cette tension, semble être le principe fondateur de la construction de la pièce.

Chez Prześluga, le langage est le protagoniste principal. C’est grâce à lui qu’elle tisse un récit poétique chargé d’émotion et infiniment personnel.

Quant aux personnages, ils sont plus importants que le déroulement de l’histoire elle-même. Ils constituent le nœud de l’intrigue. Chacun est comme un os, qui s’emboîte et forme la colonne vertébrale de la pièce.

L’écriture repose sur l’état intérieur des personnages. C’est sans doute pour cela que l’histoire elle-même, pour reprendre les mots de Prześluga, est parfois boiteuse, imparfaite et fracturée à l’instar de l’être humain.

Grâce à la puissance de son imagination, à ses associations d’images et à son traitement toujours créatif de la langue, Malina Prześluga continue de me surprendre en tant que traductrice, de me séduire et de m’intriguer. Chaque traduction est un défi délicieux, auquel j’entends répondre avec un plaisir incontestable. J’aime plonger dans son univers, errer avec ses personnages, incorporer l’histoire qu’elle raconte, souvent sombre mais toujours semée d’humour. La sincérité de son écriture et la bienveillance dont elle fait preuve envers ses personnages me sont précieuses.