Un jeune soldat revient au pays, couvert de médailles mais sans le moindre sou pour s'offrir une prostituée du port. Pour la séduire, il ira voler au cimetière le costume trois pièces de son logeur : un apothicaire, vieil avare, ronchoneur atrabilaire qui vient de mourir très opportunément. Il dépouille le cadavre et le rend à la tombe paré de son uniforme et de ses médailles. Transfiguré par le bel habit du défunt, il revient à la pharmacie, exige de la veuve le melon et la canne qui vont parfaire sa tenue, puis retourne au bordel, chargé d'un triomphant paquet de billets pour racheter la petite grue.
Le bel habit du défunt est l'exemple type de ce que Valle-Inclán appelait un "esperpento". La réalité s'y reflète, déformée par un miroir convexe. Le héros est un Don Juan grotesque et pathétique, cynique, amoral, pourfendeur désabusé des valeurs établies.
Valle-Inclán a placé en 1930 cette pièce drôle et brutale en tête de sa trilogie "Martes de Carnaval" (il s'agit du Dieu Mars dans ses avatars ridicules) où il se livre à une féroce satire du militarisme et de la dictature.