Cette trame aux allures de fait divers, à partir de laquelle Horváth brosse un portrait acide de la petite société réunie par les nombreux personnages, renvoie elle-même à un fait divers – réel ou inventé. Vers le début du siècle dernier, on aurait repêché un jour dans la Seine, à Paris, une jeune « suicidée » dont on ne sait rien. L'empreinte de son visage au sourire énigmatique aurait permis de réaliser un étonnant masque mortuaire. En ont été fait des moulages en série qui ont orné pendant des années les intérieurs parisiens.
Mélo désuet, L'Inconnue de la Seine ? Pas tant que ça. C'est là plutôt une pièce bien dans la veine tragi-comique si chère à son auteur. « Comédie en trois actes et un épilogue », précise Horváth. Un épilogue troublant, tout entier bâti autour du masque de celle qu'on a bel et bien appelée « l'Inconnue de la Seine », objet de plâtre que Horváth, fidèle à sa manière de brouiller l'espace et le temps, expose ici bien loin de Paris dans une grande ville qui pourrait être Munich, Vienne ou Berlin.
Plus que le point d'aboutissement de l'intrigue, l'énigme du masque en est le point de départ, cette pièce singulière ayant été imaginée pour prêter un fragment d'histoire à ce visage, et une raison à ce sourire.