Dans les années 60, une journaliste vient interviewer successivement Helena Rubinstein et Elizabeth Arden. Elles racontent les différentes étapes de leur vie, les obstacles qu’elles ont dû franchir, entre autre, en tant que femmes, pour devenir ces « deux icônes de la Beauté ». Dès le début de l’interview, apparaît la haine qu’elles se portent. Apparaît aussi l’admiration. Et c’est ce lien entre la haine et l’admiration qui se manifeste au travers d’une inventivité libérée. Le récit nous fait voyager de Cracovie à Sydney, de Londres à Paris, du Canada à New York, et dépeint le XXème siècle, non seulement par la découverte des crèmes anti-rides, des rouges à lèvres etc… mais aussi par ses guerres mondiales, la montée de l’antisémitisme, l’avènement du fascisme, les débâcles financières, et l’invasion de la publicité dans nos vies…
Au travers de ce récit, l’auteur fait revivre (ou « interpréter », avec plus ou moins de texte, comme au théâtre) deux femmes qui se livrent un combat sans merci, qui en même temps est une sorte de stimulant. Mais on est loin de l’anecdotique. Ce qui m’a intéressée, au-delà de la forte personnalité de ces deux femmes, c’est l’ancrage politique. Leurs vies traversent un siècle, un siècle de conflits. En plus des guerres, l’antisémitisme affiché de Arden – qui n’hésite pas appeler sa concurrente « cette juive-là ». Leurs rencontres qui vont de Coco Chanel à Goering, d’Estée Lauder à Colette… La passion de Rubinstein pour les œuvres d’art et celle de Arden pour les chevaux, Mais aussi, leur rapprochement lorsqu’apparaît Revlon,
La structure de la pièce est originale. Ses flash-backs rapides sont maîtrisés, grâce à une introduction claire et efficace des autres personnages. La vision globale du siècle, riche en évènements de toutes sortes, n’est pas uniquement une toile de fond, elle fait partie intégrante à la pièce.
L’écriture tranchante et les dialogues vifs collent au propos.