La comédie se déroule dans un cadre familial tout d’abord apparemment tranquille. C’est le matin. Aurore vient d’accompagner ses deux enfants au car du ramassage scolaire, et son mari, Ivio, se prépare pour aller travailler. La journée semble vouloir se passer selon un quotidien des plus rassurants. Mais rapidement la jeune femme présente des manifestations d’angoisse typiques d’un comportement pathologique, elle est en effet légèrement perturbée ; son mari, de son côté, affiche une relation bien peu exaltante avec son métier (il est oboïste dans un orchestre local).
La présence de Demetrio, le père d’Aurore, veuf retraité et malade imaginaire, aggrave la situation en augmentant l’agressivité du couple. Demetrio en effet se plaint continuellement et compatit à son propre sort ; moins en raison de sa morne existence que pour le plaisir subtil de développer chez ses enfants un sentiment dévastateur de culpabilité.
Talonnés par des événements pas tellement insolites, (insolite cependant est la manière dont ils réagiront), les trois personnages se débattent dans un enchevêtrement de sentiments glauques et exaspérés, au nom desquels chacun semble disposé à tout, afin d’obtenir la prédominance sur les deux autres. Comme si avoir la suprématie sur le groupe était la condition sine qua non pour ne pas se laisser phagocyter par lui. Ainsi ces trois champions du mal-être partent chacun d’une situation presque normale, à la recherche d’un équilibre meilleur ; ils finiront par le trouver dans une solution paradoxale qui les condamnera à une commune anormalité que nous ne révèlerons pas ici pour ne pas découvrir toutes les cartes.
Santanelli aime à étudier les couples. Ici il en examine deux à la loupe : le plus normal un mari et une femme, et un autre plus inattendu : un gendre et son beau-père. Ce dernier comprendra grâce à son gendre qu’il a refoulé son homosexualité. Dans le théâtre de Manlio Santanelli les femmes d’apparence fragile finissent en général par phagocyter les hommes (cf. Reine Mère). Ici, Aurore arrivera à dominer père et mari mais pour combien de temps ? La veine comique qui parcourt l’écriture de la pièce atténue les situations dramatiques en entraînant le spectateur vers le rire.