Au 1er siècle avant J.C., Tigrane II, roi d’Arménie, s’est allié avec Mithridate le Grand, roi du Pont. Au cours de ses nombreuses campagnes contre les Romains, Mithridate a cherché refuge auprès de lui. Refuge ambigu : Tigrane le traite en prisonnier privilégié et bien aimé, mais prisonnier tout de même. C’est que la pression de Rome est grande, elle met en danger
Tigrane-Dieu est une tragédie historique, mais très différente de ce que nous entendons sous ce sens : elle est sèche, rude, sans afféteries classiques et sans perruques. A ma connaissance, le répertoire joué en France n’a jamais présenté de pièce touchant à ces pages de l’Antiquité, écrites de l’intérieur par les descendants directs de ceux qui les ont vécues. Cela donne une prise particulière à l’histoire, une griffe hors du commun aux personnages, des enchaînements psychologiques hétérogènes. Tout cela, dans un sentiment d’authenticité absolue.
L’auteur ne cherche pas à faire « antique », il fait « arménien » sur un mode résolument contemporain. Ainsi une situation cornélienne (faut-il livrer Mithridate et sauver l’Arménie) est traitée d’une façon qui n’a rien de cornélien, toute en ambiguïtés, en faiblesses, en caprices, en intelligence politique et parfois aussi, en grandeur.
La structure de l’œuvre est très dynamique : entrées, sorties, mouvements nombreux au sein de cette cour qui est un grand bazar où ce qui se marchande est le cours de l’Histoire.
L’écriture de Zentountsian, toute en pointe sèche, est d’une rigueur absolue, elle se met au service tour à tour d’images quasi hiératiques, d’une pensée très byzantine, parfois encore de sentences en coup de massue. Le dialogue est très souvent une fine joute entre phrase et antiphrase, une provocation, une mise à l’épreuve, un jeu diplomatique aussi, poussé à l’extrême limite du danger.