Il s’agit d’un jeu, joué par des adultes (qui jouent à être enfants) et par des enfants (qui jouent à être adultes) : le père, la mère, leurs enfants et leur chienne. L’action se passe dans un train, dans un espace qui est toujours le même à l’intérieur, mais qui change à l’extérieur. Les personnages, qui sont à l’intérieur du train, vont nulle part. En effet, Jamais-Terre n’est pas un lieu, mais un voyage en train (un lieu auquel on n’arrive jamais, un « jamais-lieu »). Ce sont leurs mots qui voyagent et qui nous font voyager. C’est le langage qui met le train en marche. Le Capitaine Crochet est le patron du train et cherche à attraper Peter Pan.
Miguel Castro Caldas fait partie d’une nouvelle génération d’auteurs nés aux alentours de 1974, période de
Jamais-Terre, plutôt que Peter Pan, est beaucoup plus que l’histoire d’un garçon qui ne veut pas grandir, ou de l’enfant qui ne veut pas naître. C’est surtout une version contemporaine, pour adultes et pour enfants, de Peter Pan avec des échos du Petit Chaperon Rouge et bien d’autres histoires. Les personnages y parlent de la vie et de la mort, « les deux choses les plus naturelles, mais qui sont aussi celles qu’on comprend le moins » (Castro Caldas). Le détour par le conte permet à l’auteur de jeter un regard perçant voire ironique, mais aussi ludique, sur la très hétérogène réalité contemporaine. Entre le merveilleux et le fantastique, Castro Caldas maîtrise un certain nombre de codes et de conventions qu’il travaille de façon obsessionnelle. Agissant en vrai manipulateur des mots, il se consacre au jeu polyphonique et à la création d’une langue corporalisée qui lui permettent de réinventer la tradition orale. Il en résulte une écriture vive, musicale, critique, pleine d’humour qui traduit une volonté réelle d’expérimentation.